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Pierre Rigaudière Diapason juin 2011 n°592
Michaël Sebaoun Classica juin 2011 n°133
Diapason, juin 2011, n°592
Pierre Rigaudière
« L'œuvre pour orchestre » ? Pas tout à fait. Car ce disque nous parvient à l'heure où l'Orchestre national de Lyon donne la première de Pierre d'éclair. Avec cinq partitions, cinq orchestres, cinq chefs, il ouvre une très belle perspective sur l'un des pans les plus enthousiasmants de la production d'Édith Canat de Chizy. Un agencement chronologique en arche place au centre du programme Yell (1989), dont l'allusion initiale aux Jeux de Debussy ne saurait dissimuler le propos, qui consiste à styliser à l'orchestre la grammaire et les sonorités de la musique électronique. Bien que la compositrice y favorise les textures fusionnantes et le brouillage des sources acoustiques, elle n'en exclut pas les sonorités incisives et lumineuses. L'alternance de blocs massifs, d'arêtes tranchantes et d'aplats scintillants, relevée dans Alio (2002) par l'utilisation très bien dosée des percussions, est plus marquée encore dans Omen (2006) dont elle fait, avec ses motifs lancinants de vents dans l'aigu et ses contrastes aveuglants, la pièce la plus varésienne gravée sur ce disque. L'ONF, parfaitement apte à restituer l'éclat de cette musique, se distingue ici par la netteté de son image sonore.
Sans surprise, Times (2009), composé pour la finale du Concours international de Besançon, est la pièce la plus virtuose du programme - virtuose pour le chef autant que les musiciens de l'orchestre. Kazuki Yamada, lauréat dudit concours cette année-là, fait des miracles avec les forces de la BBC ; la cohérence de l'ensemble dépasse dans ce contexte tous les orchestres que ce programme amène inévitablement à comparer. Le discours anguleux, ponctué par des ruptures et des impacts que cette rétrospective incite à considérer comme des constantes, passe dans La Ligne d'ombre (2004) par le filtre d'une plus grande économie de moyens. De cette sobriété naît une force expressive plus impressionnante encore, alimentée par un cortège de figures qui, évoluant sur un fond faussement statique, poussent inexorablement vers un climax. On ne pourra qu'être frappé par une autre constante : les fins très ténues avec lesquelles Édith Canat de Chizy, dans un geste particulièrement élégant, s'efface après avoir affirmé. Pierre Rigaudière
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Classica, juin 2011, n°133
Michaël Sebaoun
En 2007, la compositrice française Édith Canat de Chizy avait fait paraître un concerto pour alto et orchestre, Les rayons du jour, sur un disque consacré à sa musique pour cordes (Solstice). On sait l'importance de cette famille d'instruments dans l'œuvre de cette ancienne violoniste ; et il est juste d'affirmer que « c'est à partir de cette couleur de base que semble prendre naissance toute la palette de ses timbres ». « Vibratile, irisée », mais aussi violente, la musique de ce disque, qui rassemble son œuvre complète pour orchestre (sans les œuvres pour orchestre et soliste donc), l'est assurément. La compositrice doit avoir un modèle en la matière : Henri Dutilleux, ou plus précisément son œuvre The Shadows of Time (une œuvre personnelle, qui résume l'époque, et inspire des compositeurs aux esthétiques variées). Une matière dense et explosive relie le chef-d'œuvre de Dutilleux à Times de Canat de Chizy, qui veut « explorer les diverses dimensions du temps » : temps contracté, obsédant, temps suspendu, temps du silence. Suit La ligne d'ombre, dont la tension est créée par une relative stabilité du discours.
La musique d'Édith Canat de Chizy puise aussi - semble-t-il - chez des compositeurs comme Pascal Dusapin, Philippe Leroux, Hugues Dufour, Bruno Mantovani. Yell en témoigne. Marqué par une évidente homogénéité styliste, ce disque s'achève, avec Omen, inspiré de Van Gogh, dans les tourments et la sensualité de la matière. Orchestre coloré et puissant, sens de l'espace sonore, réflexion active sur le temps en musique. Que reprocher, alors, à Édith Canat de Chizy ? D'écrire une musique un peu trop... de son temps ? Michaël Sebaoun
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Édith Canat de ChizyL’Œuvre pour orchestre avec : BBC Symphony Orchestra , Alain Altinoglu, Orchestre National de France, Orchestre Poitou-Charentes , Orchestre de Besançon Montbéliard Franche-Comté, Nouvel Orchestre Philharmonique de Radio France, Peter Csaba, Michiyoshi Inouë, Kazuki Yamada aeon - 2011 - ref : AECD 1105